Page:Rachilde - La Jongleuse, 1900.djvu/65

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— Pourquoi voudriez-vous me faire du mal ? dit-elle, reculant sa robe d’un geste vif de pensionnaire qui a peur… ou qui s’amuse. Je ne vous ai rien cassé, moi, Monsieur.

— Ah ! vous ne m’avez rien cassé ? Vous venez de gâcher mon existence pendant toute une semaine, j’ai fait la noce à l’endroit précis du livre où je devais étudier, et je me suis mis à lire à l’endroit précis où la plus élémentaire prudence vous recommande, au contraire, de s’amuser ferme… Rien cassé ! Et mes meubles ! Et mon Dieulafoy ! et mon amphore personnelle ? Vous appelez ça rien, vous ! (Il glissa furtivement sa main sur son genou, l’y appuya, rageur.) Et je me suis avili par-dessus le marché, car c’est s’avilir que de donner le nom de la femme qu’on veut à celle qu’on ne désire pas. De plus, au seul point de vue hygiénique, c’est déplorable. Éliante, pourquoi écrivez-vous des lettres débutant par cette phrase colossale : Monsieur et cher amant ! Si vous vous figurez que je vais vous la rendre !… Hum ! Vous vous êtes bien compromise, Madame. Je vais montrer ça, je vous jure, à tous mes amis du quartier latin. Rassurez-vous, j’en ai fort peu. Monsieur et cher amant ? Je reçois le vendredi ! Elle n’est pas longue votre lettre, mais du diable si je démêle ce que vous