Page:Rachilde - La Tour d’amour, 1916.djvu/244

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Il s’agissait du Marceau, un cuirassé prenant la mer, et nous chantâmes des complaintes lugubres en son honneur. C’est-y la mer qui le prendrait ?

Je voyais filer à toute vitesse ce grand cheval noir de navire qui s’était broyé sur la Baleine, par le travers de chez nous, et que les autorités essayaient de repêcher du côté du Fromvheur. Pour son équipage, personne n’en causait plus.

Des idées formidables me tenaillaient le cerveau : faire la guerre à la mer, étrangler la mer, couper sa tête.

Je serrais mon eustache sous ma ceinture. Je voyais du rouge couler du plafond de la salle où nous buvions.

De nouveau, dans la rue, lâchant les camarades, je festonnais, battant les murs. Ça tournait d’une façon vertigineuse. Plus aucun bec de gaz, plus de lanternes de voitures, plus de phares sauveurs. Je n’arriverais jamais nulle part cette nuit-là.

On entendait s’éloigner les chansons, les rires,