Page:Rachilde - La Tour d’amour, 1916.djvu/37

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choses, méticuleusement. Il ramassa d’abord ses miettes de pain, puis les miennes, fureta sous son escabeau pour y pincer les petits morceaux de lard du jambon qu’il avait crachés en mangeant. Dès qu’il eut tout râclé, il fit un tas au bord de la table et d’un coup de revers l’envoya du côté de la porte, c’est-à-dire dehors. Ensuite il se versa une demi-tasse de son rhum, l’avala, hocha le front, lentement, comme un à qui l’on demande son avis, et ne m’en offrit point. Ça m’offensa.

À demi noyé, à peine séché, l’estomac mal remis, j’aurais eu besoin d’un dessert plus confortable. J’étais habitué aux soupes chaudes du réfectoire des Ponts-et-Chaussées. Elles n’étaient pas fort grasses, mais bouillaient jusque dans l’écuelle, et cela nous chassait l’eau de mer des idées. D’ailleurs, rapport à mon entrée dans cette maison, la mienne un peu, je me croyais des droits à une bienvenue plus cordiale. Un homme en vaut un autre. Si je me trouvais l’inférieur, nous n’étions que deux entre le ciel et