Page:Rachilde - La Tour d’amour, 1916.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

du bateau, deux canaris superbes ; mais, voyez ma guigne, c’étaient deux mâles ; ils commencèrent à se battre et à se déplumer ferme aussitôt installés dans ma cambuse.

Ce vent nous fournissait, d’ailleurs, tous les agréments d’une bataille en règle, à nous deux le vieux. Notre grue d’arrimage cassa par le milieu, et il me fallut grimper aux échelons extérieurs pour en ficeler les deux morceaux. Cette épissure me prit toute une journée pendant que le vieux me criait, du bas, des gros mots de vieille femme furieuse, gueulait comme la mouette à travers les tempêtes. Je savais bien qu’il devait cacher plus d’expérience que moi ; pourtant, j’aurais voulu l’y voir, son expérience, sous la rafale, avec des coups de fouets de la corde restée libre qui me brisait les reins, avec les douches salées qui m’inondaient la bouche et les yeux, un pied recroquevillé entre deux crampons de fer, lesquels devenaient brûlants tellement je les serrais dans ma plante douloureuse, un bras tenant le mât et l’autre outillant pour