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Page:Rachilde - Le Démon de l’absurde, 1894.djvu/57

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sement garni, parce que, disait-elle, c’était toujours plus loin qu’on ne le pensait.

Au bout d’une heure de marche dans les blés et dans les vignes, nous arrivions sur la pente caillouteuse d’une colline creusée à son centre, endeuillant d’une ombre épaisse et froide un hameau de cinq ou six pauvres masures. De ci, de là, des gens taciturnes. Les hommes arrangeaient des tonneaux sans crier ni jurer. Les femmes, berçant des nourrissons, ne chantaient pas. Peut-être avais-je, moi tout seul, cette spéciale vision d’un village endormi, puisque mes compagnons ne remarquèrent vraiment rien d’anormal en traversant ce coin de pays d’ombre. Cependant, madame Téard, ayant voulu acheter un peu de lait, s’aperçut qu’on ne lui répondait même pas, et elle me dit d’une voix ennuyée :

« Ils sont comme çà, ici ! »

La vieille dame s’installa au bord d’un lavoir primitif où gargouillait une fontaine par des conduits de bois ; elle nous souhaita