Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/120

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— De quelles vanités sont donc pétries nos sœurs Basine et Chrodielde ? De quelles sottises vont s’enfler leur cervelle de chèvre et pourquoi, depuis plusieurs lunes, s’obstinent-elles dans leur posture scandaleuse ? Je vous le déclare, mes filles, l’année sera mauvaise, bien mauvaise pour nous toutes. Des étoiles impures encombrent le firmament de leur queue satanique. On a vu, le jour de Pâques, des flammes jaillir d’une montagne et le monstre dévorant qui ensanglanta les rues de Poitiers cet hiver ne prit forme de loup que pour se déguiser. Il reparaît au monastère où on entend gémir nos bons serviteurs. Ils disent que nous n’aurons point de blé cet été, si cette chaleur d’enfer continue. Les récoltes sécheront sur pied. Point de légume et point de fruit. Comprenez-vous enfin que Dieu se lasse et que sa colère va s’appesantir sur nos fronts ? Hâtons-nous de les couvrir de cendres ! Que signifie ces mines de révoltées ? Les unes veulent s’habiller selon le monde, les autres ont l’audace de manger plus que leur appétit. Toutes ont la mollesse dans les membres et dorment aux offices. Croyez-vous que je puisse tolérer vos débordements ? Il en est qui veulent boire du vin à tous les repas quand nos vignes dépérissent. Ah ! mes filles, vous êtes des servantes et rien que desservantes, ne l’ou-