Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/147

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— Maîtresse, ce n’est pas un abîme, c’est une sorte de grotte où coule une source, une eau très pure qui pourrait être utile si nous étions obligées de nous terrer. Mais… par la Sainte-Croix, est-ce que je rêve ? Les idoles !…

Comme elle se tournait vers la muraille, l’esclave eut un mouvement de stupeur, sinon de véritable effroi. Un pan de lierre s’abattit avec un bruit mou d’étoffe. L’abbesse se signa, tout effarée.

— Que vois-tu ? Que vois-tu ? questionna-t-elle, tremblant de tous ses membres et craignant de voir par les yeux subitement illuminés de son esclave.

— Je vois qu’elles sont revenues, fit l’esclave d’un ton calme après un moment de silence plus effrayant que n’importe quel cri d’épouvante.

Leubovère se dressa, les poings crispés.

— As-tu fini de me faire endurer ce supplice, chienne, hurla-t-elle ! Que vois-tu donc qui te met aux yeux ces lueurs d’enfer ? Veux-tu parler ?

L’abbesse aurait tenu le moindre bâton qu’elle s’en serait servie pour caresser rudement les épaules de son esclave favorite.

Soriel n’était pas émue. Sa grande taille prenait dans ce jour vert une dominatrice apparence de fantôme. Sa tunique de toile, beaucoup plus serrée