Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/204

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chemin en larmoyant des larmes rouges, se frottant les paupières d’orties pour inspirer la pitié. Il connaissait des femmes riches qui lui donnaient des quartiers de chevreau, il allait aussi chez Marovée, l’évêque de Poitiers, hardiment, criant d’une voix lamentable :

— Je suis le serviteur de la Croix. Le Seigneur Jésus m’a fermé les yeux sur sa gloire.

Et il prétendait qu’il avait vu le Christ un certain jour de Pâques, tout ruisselant de vin.

Très habile en paroles, il n’aimait guère les disputes. Il venait pour savoir ce qu’on pourrait gagner au service de ces nouveaux maîtres et il blasphéma, supposant que cela leur plairait.

— Par les œuvres de Satan, — et que sa griffe mette au jour les tripes de notre évêque — j’ai quitté la Basilique pour mendier en forêt avec mes compagnons, parce qu’on nous a assuré des tranches de porc. Nous voudrions savoir pourquoi on nous apprend l’exercice de la lance et le saut du cheval. Nous sommes des créatures patientes, des hommes doux qui ne souhaitons la mort de personne.

Des garçons à moitié estropiés, un, presque nu, des ulcères horribles sur la poitrine, s’écrièrent simultanément :