Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/267

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chercher une tunique, des lanières de cuir pour attacher mes sandales, puis tu sonneras de la trompe… Dans le tumulte du réveil, Ragna pourra se sauver sans être aperçu…

— Est-ce possible ? Est-ce possible ? soupirait Harog, accablé de confusion.

— C’est possible ! répliqua froidement Basine, et on aurait tort de la nommer abbesse à ma place. Tu es témoin que ce n’est pas son métier.

Lorsque le camp s’éveilla au bruit terrible de la trompe d’Harog, il y eut un tel fracas d’armes et de cris qu’on n’entendit pas crouler un bouclier sous la tente de Chrodielde. Ragna, se dépêtrant du manteau écarlate, complètement dégrisé, fit un bond énorme, abandonnant toutes ses richesses à sa princière amante. Il était venu la trouver, sur un signe d’elle, en attirail de héros et s’enfuyait comme un voleur. Chrodielde, un moment effarée, se tordit de rire, le voyant courir presque nu vers la Pierre.

— Nous sommes des hommes, Aog ! pensa-t-elle ironiquement, et, très satisfaite d’en être quitte pour la peur, elle se leva, car il fallait s’occuper des choses sérieuses…

La troupe s’avança en un ordre parfait conduite par deux jeunes cavaliers merveilleusement beaux. On eût dit deux frères, l’un l’aîné, très sombre de