Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/386

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plus supporter la faim, la nudité, et, en outre, le danger des mauvais traitements ; ajoutant, de plus, que diverses personnes venaient, contre toute convenance, se laver dans leur salle de bain, que l’abbesse jouait au tric-trac et que des séculiers venaient se recréer avec elle, que même on avait célébré des fiançailles dans le monastère ; que l’abbesse avait osé faire des vêtements à sa nièce avec un dessus d’autel en soie ; qu’elle avait eu l’impudence d’enlever les feuilles d’or qui entouraient cette étoffe et criminellement les avait suspendues au cou de sa nièce ; qu’elle avait, de plus, fait à sa nièce, par prodigalité, une bandelette ornée d’or, pour jouer des mascarades dans l’intérieur du monastère. Ayant demandé à l’abbesse ce qu’elle avait à répondre, elle dit : Relativement à la faim dont elles se plaignent, autant que la pénurie des temps l’a permis, elles n’ont jamais éprouvé une trop grande privation. Au sujet des vêtements elle dit : Si l’on visitait leurs coffres, on trouverait qu’elles en ont plus qu’il ne faut. Quant à ce qu’on lui reprochait relativement au bain, elle rapporta que ce bain avait été construit pendant le carême et qu’à cause de l’âcreté de la chaux et afin que la nouveauté de la construction ne pût être dangereuse pour les baigneuses, madame Radegunde avait ordonné que les serviteurs du monastère en usassent librement, jusqu’à ce que toute odeur nuisible eût passé et que ce bain avait été ainsi à l’usage des serviteurs durant le carême jusqu’à la Pentecôte. À cela Chrodielde a répondu : Et après beaucoup de gens s’y sont lavés en différents temps. L’abbesse reprit qu’elle désapprouvait le fait et qu’elle ignorait