Page:Rachilde - Le Meneur de louves, 1905.djvu/92

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vieille sorcière filant quenouille ! Depuis bien des printemps il portait en sa poitrine une malsaine vapeur qui gonflait son cœur de soupirs inutiles. Ayant étudié la vertu des plantes, il savait ce qu’il aurait fallu faire, mais ne le faisait point. À présent l’heure arrivée de se guérir il n’allait pas s’occuper de ce rat grattant…

— Basine, dit-il très bas, je suis monté par le mur des galeries. Je ne pouvais pas entrer par les portes, ni par le cloître, encore moins par la chapelle de l’abbesse. Quelle recluse veux-tu que je délivre ?

Basine eut un léger rire d’enfant.

— Tu n’as pas entendu parler de notre recluse, celle qui ne doit plus voir le soleil ? Même avec ton couteau perceur de loup, tu ne saurais percer le mur de sa retraite, Harog. Donne-moi la main… Oh ! Comme tu as chaud ! Tu es heureux de vivre, toi, petit berger ! Viens !

Harog se laissait conduire, n’osant s’abandonner tout entier à cette joie nouvelle de reconnaître le printemps dans la voix d’une femme. Il rêvait. L’herbe molle étouffait leurs pas, la lune caressait le jardin et versait du lait sur leur front, mais un goût de myrrhe, de fruit amer ou bénit, agaçait encore les lèvres du jeune chasseur… Ce jardin lui semblait rempli d’embûches, des trappes se