Page:Rachilde - Le Parc du mystère, 1923.djvu/22

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m’enfermer, après le dîner, avec un havane qui me tient compagnie sans me heurter, témoin sceptique et muet de mes impatiences d’une heure, de mes amertumes et de mes joies.

Je ne bois jamais de liqueur. J’abomine ces boissons toxiques. Mais je comprends, je sais le plaisir qu’elles causent à certains hommes. Le soir où je dois lire une lettre de vous, je le fais avec la dévotieuse volupté que mettent les amateurs à avaler par petites gorgées compassées un verre de Vieille Fine.

Seulement, votre esprit n’a pas toujours le même goût. Vous êtes une irrésistible force de la nature, contradictoire, tendre et cruelle, parfois étrangement lumineuse et aussitôt impénétrable comme un puits de mystère. Vous êtes un terrain dangereux sur lequel il ne fait pas bon aux faibles de s’aventurer. Et c’est peut-être pour cela — certainement pour cela — que je vous aime. Parce que votre cer-