Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/123

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— C’est bizarre, fit-il avec pitié, comme un bouton de rose ça vous rappelle un radis.

— En effet, répliqua Reutler d’un ton tranquille ; et il héla Jorgon.

Jorgon entra, l’œil discret, aussi morne que ses maîtres. Il épongea le parquet, ramassa les miettes de porcelaine, puis, courbant les épaules, prêt à recevoir la bourrasque, demanda :

— Monsieur Paul sortira ?

Paul réfléchit un moment, tordant son fleuret d’un geste machinal.

— De ce temps-là, je ne pourrai jamais ! gronda-t-il entre ses dents. Non, je ne sortirai pas. Le groom ira seul. D’ailleurs… je tousse…

Et, comme preuve de son absolue, de son enfantine lâcheté morale, il se racla le gosier, très consciencieusement.

Jorgon, fort grave, hocha le front.

— Oui, dit-il, la pluie n’est pas bonne, ce matin. Et les fleurs, Monsieur ?

— Les fleurs habituelles, Jorgon. Azalées, jacinthes, et surtout des roses, beaucoup de roses ! J’y tiens. Que tout soit fait comme en ma présence.

— Entendu, Monsieur.

La porte se referma doucement, sournoisement, en couvercle de tombe, et Paul se glissa jusqu’au lit de repos où il s’affala près de son frère.

— Toi, tu ne dis rien ! Ce que tu m’agaces avec ton vieux traité ! Tu pourrais toujours grogner pour me distraire…

Reutler, silencieux, posa son manuscrit.

Paul bâilla.

Là-bas, sur un banc, les masques d’escrime