Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/16

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homme, monstrueux joujou de collégien trop riche, peut-être bizarrerie de fol adolescent point encore guéri de ses anciens caprices d’enfant gâté. À droite, Polichinelle, mi-partie rose et jaune, élégant, fade à lever le cœur, le visage enluminé de sa traditionnelle lie de vin, bossu à souhait, coiffé de son gigantesque chapeau dont les grelots de vermeil tintinnabulaient quand on fermait les portes. À gauche, un scaphandrier, muni de sa lanterne, harnaché de ses nombreux fils de cuivre et tuyaux de caoutchouc, sa hachette de combat au flanc et sa phénoménale tête creuse masquée de ses loupes de cristal, effrayantes parce qu’elles scellaient le mystère d’un intérieur vide.

Au faîte d’une étagère d’ivoire, dominant les fantoches, un vase de verre vénitien, léger, glacial comme le souvenir d’un matin de gelée blanche, épandait, au-dessus de la complication des odeurs artificielles et des gestes de comédie, l’exquise simplicité d’une branche de mimosa.

Paul cherchait toujours, tournant autour du lavabo et de l’armoire. Ses pieds étroits, engainés dans des souliers vernis, très pointus, prenaient un aspect de griffes rôdeuses et leurs glissements luisants étaient inquiétants à suivre le long des tapis d’une neigeuse douceur. Il vit l’objet dont il avait besoin, en s’arrêtant devant le scaphandrier. Il détacha la petite masse d’armes qui pendait à la ceinture du mannequin, puis, ployant le genou, coucha la toison d’ours d’un revers de mains et fixa, du bout de ses ongles, sur la surface plane, la troisième perle qu’il n’avait pas encore mise. Alors, levant sa hachette, il frappa. La perle