Page:Rachilde - Les Hors nature, 1897.djvu/231

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lança l’échelle de corde à l’angle de l’église. Cela passa par-dessus la foule comme la queue d’un cerf-volant, s’abattit où il fallait, sur la corniche, et ce fut assez solide pour supporter une légion. Ébahi, le forgeron examinait ce jeune blondin, en vêtements blancs, qui grimpait. Ce gamin-là tenait une hache plus pesante que toute sa jolie personne de demoiselle, et ses pieds étaient pourtant fleuris de roses d’or, ni plus ni moins que ceux de Notre-Dame de Lourdes.

— Je monterais bien, songeait l’ouvrier, flairant les cordes comme un ours en cage flaire la liberté, mais, j’ose pas… mâtin ! On dirait des cheveux ! Ça doit être inventé exprès pour lui.

Paul atteignit la corniche. Il s’assit, se remémorant les canapés de Rocheuse, il prit son pied dans sa main, ôta sa mule et visa le forgeron :

— Apporte ! cria-t-il.

Le forgeron monta, vexé, enragé, prêt à le rosser quand il serait là-haut et dompté par sa crânerie. S’il ressemblait à une demoiselle, on ne pouvait pas exiger de lui qu’il en eût la bonne éducation. D’ailleurs, les domestiques du château prétendaient tous que celui-là possédait le vrai caractère français.

La foule reçut la commotion électrique d’une nouvelle foi, lorsqu’elle vit apparaître sur l’église ce bel ange de lumière. Tous les jeunes gens prirent des haches et des marteaux. Dieu lui-même désirait qu’on démolît quelque chose, cette nuit-là !

En bas, Reutler, pâle comme un mort, devenait féroce. Il sauva la fille appelant au secours, faillit