Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/147

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tune et on aurait une armée de soldats reconnaissants prêts à donner des coups de torchon de tous les côtés. On se mettrait à leur tête pour gagner d’abord sa pauvre existence et ensuite à l’Élysée où ils exécuteraient un nettoyage général. Hein ! vous riez ? Chez nous, à Belleville, les amis auraient tous adopté mon invention pour leur bourgeoise, histoire de me réchauffer le cœur.

— Monsieur Tranet, je vais réfuter vos arguments politiques par l’opinion de Marie que voici avec la vaisselle, déclara le docteur gonflant ses joues, sûr d’avance de son triomphe. Marie, approchez-vous, ma brave femme.

La servante déposa la pile d’assiettes propres qu’elles rapportait de sa cuisine dans le buffet de la salle à manger, et elle se frotta les mains contre ses hanches.

— Qu’est-ce que cet objet-là interrogea solennellement le docteur Rampon.

— Ma foi, monsieur, répondit la bonne après une légère hésitation, c’est un moulin à vent.

— Vous voyez, mon cher Tranet, qu’elle ne prendra jamais cela pour un moulin à café. Le bon sens populaire, heureusement, sait faire prompte justice de vos utopies. Vous avez des illusions qui n’attrapent que des fous de votre sorte. Vienne une cuisinière calme, et votre moulin à café prend sa véritable destination, il ne moud plus que du vent, monsieur Tranet.

Mme Caroline hochait la tête. Ce docteur, quel logicien !

— À mon tour ! rugit le père Tranet.