Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/164

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saurait adoucir. C’est si charmant d’être la providence des petits et des humbles quand on est riche et qu’on n’a rien de mieux à faire.

Tout cet exposé de choses gracieuses les engoua. Maman Bartau n’y voyait aucun mal. La ame tombait des nues à propos… puisqu’on n’écoulait plus le bois dur et que la cliente payait toujours comptant. Louise, écœurée par certaine opération du docteur Rampon, ne songeait qu’à se distraire pour tâcher d’oublier l’indifférence de son mari. Le mari, lui, avait peut-être deviné que la dame, une toquée, les recevait comme on mange les merles, c’est-à-dire parce qu’elle ne pouvait recevoir mieux, mais, intérieurement flatté de cette relation, qui était de double rapport et comme clientèle et comme politesses, il se laissait entraîner à lui rendre des visites, plus longues, en vérité, qu’un marchand ne les doit. Il amenait Louise et lui faisait les mille observations d’usage.

— Tu te tiendras droite. Tu n’auras pas l’air étonnée. Ne regarde pas trop les tableaux, elle croirait que tu n’as jamais admiré de peinture. Si tu lui joues ta valse, tâche de ne pas rester court comme le soir de la Sainte-Caroline. Veille bien à tes manières, nous lui devons des égards au moins, car elle n’est pas de notre monde, c’est une grande dame. Habille-toi selon tes moyens, mais n’oublie pas les gants frais. On peut la remercier : figure-toi qu’elle va nous faire avoir la concession des bois du château, elle fait ce qu’elle veut là-bas… je crois même qu’elle connaît le comte de Paris.