Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/206

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frangeait sa lèvre, sa lèvre orgueilleuse qu’elle mordait de ses dents pointues.

— Non… Je préfère mourir !

Il baisa, ivre de volupté, la main qui le repoussait. Marcelle se renversa en arrière avec un râle furieux.

— Je vous hais… je vous hais… Oh ! les hommes, les misérables… Êtes-vous donc assez lâches !…

Louis se précipita sur sa bouche.

— Tais-toi, Marcelle, je ne suis pas un lâche. Je ne te prendrai pas de force, bien que tu le mérites pour tes cruautés atroces… Marcelle* je t’en supplie !…

Elle haletait.

— Tu es un enfant ! finit-elle par lui dire au milieu d’un spasme…

Une heure après ils devisaient de l’amour. Cette inexplicable crise les avait unis dans une inexplicable tendresse. Couché devant le feu, Louis l’admirait, car elle était superbe, sa lionne devenue chatte : elle se drapait d’une mousseline neigeuse pour aller chercher le repos sous les rideaux roses de son lit de princesse. Les billets jonchaient le sol répandus là comme le prix de ses faveurs, éveillant une idée courtisanesque, peut-être un souvenir assez drôle pour faire rire le jeune amant.

— Mais oui ! j’ai trahi ma femme, disait-il d’un ton tranquille, cuvant sa joie avec cette sérénité qu’ont tous les hommes honnêtes lorsqu’ils accomplissent ce genre de crime. Tu le voulais, j’aurais eu mauvaise grâce de ne pas profiter d’une si belle occasion… car tu es très belle ! Un garçon de quinze ans tout à fait. Ni hanches ni poitrine, et cependant quelle peau