Page:Rachilde - Madame Adonis, 1929.djvu/221

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mai, parmi les roses, et il fut très digne. Le père Tranet, vêtu d’une redingote majestueuse, eut pour témoin le charcutier, M. Chinard, un homme correct, en habit, au ventre raisonnable et à la chaîne de montre luisante, et un tonnelier chez lequel, jadis, Isidore Tranet jeune avait fait son apprentissage de célèbre inventeur du tonneau de luxe. Le tonnelier était aussi en habit, car le petit commerce a toujours un habit de cérémonie, seulement il avait une cravate bleu de ciel sur un gilet ouvert. Cela nuisait à l’ensemble. Mme Bartau (Caroline) portait une robe de soie noire avec une tournure, ce qui avantageait sa taille d’une manière sensible. Elle était coiffée d’un chapeau en plumes d’autruches nimbé de roses rouges. Effet du mois de mai, naturellement Chez le notaire, la veille, on avait dressé des actes minutieux relatant que le futur donnait ces cinq mille francs, moins trois cent vingt-cinq francs mangés pour la pension, et demeurait commis au magasin Bartau. Caroline, l’associée de son fils, gardait la haute main sur les affaires, le père Tranet ne devait rien y voir en sa qualité de failli. Tranet signa tout ce qu’on voulut lui faire signer. À quoi bon chicaner quand on épouse une bourgeoise de la valeur de maman Bartau ? Le notaire riait sous cape. On organisait l’intérieur de Tranet comme une chambre de petit garçon :

— Tu peux jouer avec ceci, mais tu né dois pas toucher à cela…

Et il signait toujours, fier de son important avenir dans la raison sociale. Il y eut quelques loustics braillards dès que les voitures de la noce s’engouffrèrent rue de l’Intendance, puis