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nono

— Et toi, riposta Bruno outré, est-ce que tu dois savoir si cela ne suffit pas ? »

La vivacité du méridional reprenait le dessus. Elle se pencha :

— M’aimerais-tu encore en admettant que je sois le plus savant ? »

Nono recula.

— Il faut, pour que tu saches, qu’on t’ait appris ! »

Elle riait toujours, mais plus bas, d’un rire irritant qui faisait mal.

Il la regarda et se releva éperdu. Il ne vit pas Renée, il vit une femme vraie, comme il disait : quelque chose d’atroce, de fané, d’avilissant… un hochet secoué par tous…

— Déjà… tombée dans la boue !… »

Cette vision traversa son regard comme la lueur des éclairs sillonnait parfois les médaillons transparents des rideaux.

Nono honnête, fondu d’un or sans alliage, se révolta, redressa, dans la clarté du lustre sa stature bien masculine ; puis il lui dit, croyant parler à une autre :

— On ne m’a pas aimé assez pour que je sois heureux, c’est vrai… riez de ce ridicule, puisque c’est ridicule… seulement Renée Fayor m’aime encore moins, car elle va briser mon cœur sans le comprendre. »

Renée tendit les bras.

— Ah ! tu me fais peur ! laisse-moi rire… c’est