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Renée la tête baissée, cherchant son poignard dans le gazon.

Le duc l’aperçut et le lui rendit.

— Une chose espagnole vraiment utile, murmura M. de Pluncey, mais remarquez combien cela préserve mal ceux qui se noient. »

Renée remit l’arme à son corsage et sourit tristement.

— C’est offensif ! dit-elle pour faire une réponse ; elle ajouta, en arrangeant sa coiffe et sa toque :

— Je m’appelle Renée Fayor, Monsieur, et je vous remercie.

— La fille du général Fayor ! s’écria le duc. Ah ! par exemple ! La fille de mon fougueux adversaire politique qui vient de faire un discours si étonnant au Conseil de Montpellier. Je suis ravi d’avoir pu rendre un service à l’enfant d’un homme qui voulait m’étrangler hier. »

Renée ne comprenait plus.

— Mon père se porte donc pour la députation ? interrogea-t-elle, effrayée.

— Bon ! je découvre les secrets de famille, à présent ; oui, Mademoiselle, il se porte ! Il fait éditer un volume sur la guerre. Il remue le pays. Nous avons chacun nos agents intimes ; nos journaux clament, et nous devrons nous battre. Il paraît que je suis un épouvantable royaliste et qu’il est un atroce républicain. Et sur le tout, brochez le maire de Gana-les-Écluses, un maire qui assoiffe ses administrés.

Renée, s’appuyant sur le duc, faisait des pas mieux