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nono

— Ceci est étrange, scanda-t-il, je n’ai jamais commis l’imprudence de croire qu’un secrétaire fut un homme, mais, je vous voyais des mains d’une puissance rassurante pour… ma voiture. Cependant, vous êtes bien bâti, mon garçon. Tudieu ! je ne m’étonne plus que les discours de votre général aient tant de muscles. » — Le duc gagnait du temps. — Je dois avoir l’air absurde, » murmura-t-il en a parte.

M. de Pluncey était sur des braises. Il ignorait que Renée fût dans le temple, car on ne voyait rien s’agiter du dehors et l’aurait-il su qu’il se serait trouvé doublement absurde.

En réalité, sur le chemin où Largess dormait au soleil, la voiture qui n’avait subi aucun accident, attendait le duc.

Nono se croisa les bras dans une pose muette qui annonçait le paroxysme de l’irritation.

— Vous êtes du pays ? demanda le duc se décidant à parler puisqu’il lui devenait impossible d’agir.

— Oui, monsieur.

— Jolis sites dans le Midi !… mais vilain peuple ! »

La langue de Nono s’embarrassa, il ne put trouver qu’un son rauque pour toute riposte.

— Les gens y ont l’allure de jeunes carnassiers flairant du mouton cru, continua le duc, en secouant avec flegme la cendre de son cigare.

— Monsieur… encore une fois, vous n’êtes pas chez vous ! rugit Nono qui songeait à se tailler une canne dans le fourré voisin.