Page:Rachilde - Nono, 1885.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
224
nono

Le général suffoqué offrit un siège et resta debout. Tous ses plans étaient bouleversés.

— M’expliquerez-vous ?… bégaya-t-il.

— C’est fort simple, monsieur, dit le juge d’une voix métallique, depuis cinq ou six mois, la police parisienne recherche un certain Victorien Barthelme disparu, et que des membres de sa famille désirent retrouver.

— Et en quoi cela peut-il intéresser ma candidature ?… fit l’irascible général.

— Ne m’interrogez pas, monsieur, je vous prie : cet individu a quitté la gare de Lyon un lundi matin à sept heures précises, il est arrivé à la gare de Montpellier dans la nuit vers dix heures, il portait un paletot gris…

— Un paletot gris ?… s’exclama le général enrageant de ne plus comprendre du tout.

— Oui. Connaîtriez-vous ce paletot ? interrogea le juge oubliant qu’il n’était pas dans son cabinet.

— Vous vous moquez de moi ! cria Fayor furieux,

— La justice ne rit jamais, monsieur, murmura le maire pour glisser une phrase sérieuse.

— Après ? reprit le général instrumentant à son tour.

— Après, monsieur, il n’y eut qu’un paysan domicilié sur vos terres qui l’entendit parler et peut se souvenir de ses dernières paroles.

— Vraiment ! des paroles solennelles, hein ? objecta le général confondu, quoiqu’il flairât une manœuvre de la dernière heure.