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Le domestique eut l’air de ne pas comprendre ; puis, très ennuyé de la commission, il tendit une lettre au général.

« Mon général, disait Nono, je vais rejoindre ma mère qui a besoin de moi. J’ai eu peur que vous me refusiez cette permission et je l’ai prise…

» Adieu, mon général, pardonnez-moi, vous ne me reverrez plus. »

M. Fayor devint pourpre, il passa le papier au maire de Gana en s’écriant, par habitude :

— Quinze jours d’arrêt à ce drôle ! »

Mademoiselle, qui découpait une magnifique pêche veloutée, laissa choir son couteau sur son assiette et cela rendit un son mat. L’assiette de fine pâte de Sèvres se fendit, mais Renée ne pouvait s’émouvoir au sujet d’une assiette, elle n’eut qu’un petit rictus de dépit.

— François, dit-elle d’un ton très net, donnez-moi la bergère pompadour qui servait de pendant et mettez à part celle-ci pour le grain de ma volière. »

Le juge d’instruction se leva tout d’une pièce.

— Il est en fuite ! articula-t-il oubliant sa retenue habituelle.

— En fuite ! répéta le maire effaré.

— Que signifie ? » grommela le général, ému malgré sa rudesse.

Le duc sortit de son mutisme.

— Je l’ai rencontré, en effet, pendant ma chasse, il portait un paquet de livres sur le dos !

— Ceci est grave ! déclara le magistrat, très inquiet.