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très estimable, d’une éducation rare ; sa grande fortune lui permet de venir en aide à tous. Vous deviez, au contraire, vous ménager sa protection.

Cette phrase fit mal au pauvre Nono.

— Sa protection ! dit-il en se redressant.

— Mais, objecta le magistrat souriant, elle ne peut qu’être flatteuse pour vous. »

Un éclair brilla dans les yeux du jeune homme ; le juge comprit qu’il avait trouvé la voie.

— Vous êtes amoureux de sa femme ? demanda-t-il sans transition. Bruno recula.

— Non, non… je ne suis pas amoureux de la duchesse de Pluncey ? s’écria-t-il avec énergie et il ne mentait pas, cette fois, il n’aimait que Renée Fayor.

— La jalousie excuse bien des crimes, insista le juge devenu sérieux.

— Je n’ai pas besoin d’être excusé, monsieur. Je suis innocent. Je n’aime pas la duchesse. »

Le magistrat fut étonné. Il avait cependant cru découvrir une excellente raison.

— Vous n’avez pas autre chose à me déclarer sur Barthelme ?

— Je ne sais plus rien, répondit Bruno accablé. Puis-je voir ma mère ? demanda-t-il pendant que le greffier essuyait sa plume le long de ses manches.

— Oui, une heure, aujourd’hui. Maintenant souvenez-vous que les aveux les plus insignifiants sont précieux pour la justice et que parfois ils amoindrissent les peines réservées aux coupables.