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nono

— Mon Dieu ! pensa-t-il, que va-t-il se passer ? »

Dehors, le duc observait derrière le store de son coupé, pendant que Largess soufflait dans ses doigts.

Ce soir-là, Lilie fatiguée faisait de bonne heure sa toilette de nuit. La petite chambre provinciale était bien close. Une bûche se consumait au fond de l’âtre et éclairait par intervalles, d’une lueur sanglante, le bouquet de mariée dormant sous son globe de verre. Le lit avait des rideaux bien repassés, ornés de petits grelots de coton blanc.

Au bas de ce lit, le tapis représentait un gros chien, emblème, sans doute, de la fidélité de M. Chauvol.

Un guéridon de noyer supportait quelques coffrets où se serraient les travaux du jour. Une brassière en piqué se tenait droite au milieu, et, par-ci par-là, des rosaces de crochet inachevées.

Lilie devant sa cheminée se haussait pour arranger ses nattes au-dessus de la pendule qui masquait la glace. Elle mettait une résille blanche, comme le coton des rideaux. Elle était devenue jolie femme, Lilie Névasson, elle avait des fossettes, des couleurs vives et de gros bras de bouchère.

Elle ne pensait pas à se retourner ; elle pensait à la brassière raide et son sourire disait le reste.

Soudain, elle laissa choir la résille, une nuance verdâtre se répandit sur ses joues… une tête venait d’apparaître sur son épaule dans la glace.

— Vous ne m’attendiez donc pas ? dit la duchesse de Pluncey avec ironie…