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lier de Paris… ; puisque tu en viens, tu dois me l’avoir rapporté. Envoie tout poste restante. La bonne est toujours pour nous. Fais attention aux miennes. Cette maison où tu es me fait peur car ton général est bien méchant. Il a une mauvaise réputation, ici, où tout le monde le connaît. Cette demoiselle est bien drôle de courir la nuit et de se décolleter le jour… Elle est peut-être folle… je ne ferai jamais ça quand je serai ta femme. J’aurai des corsages montants. Tu sais comme maman a veillé sur mon éducation, et je tiens à te faire honneur. Mon cher Nono, ta Lilie te consolera de tout ce que tu auras souffert pour elle !

» Ah ! voilà le prétendu à papa ! Je vais descendre et je vais te dire ce qui se sera passé. On m’a fait habiller, je me sens honteuse. J’ai regardé par la fenêtre, derrière notre enseigne, et il m’a paru moins bien que toi… Maman m’appelle !
 
 

» Je suis bien désolée, M. Maldas, je n’osais plus continuer cette lettre commencée il y a huit jours… enfin… je vous l’envoie tout de même. Hélas ! nous ne devons plus nous revoir. On m’a fiancée, malgré moi, croyez-le. Je suis sacrifiée, car le prétendu de papa doit s’associer à son commerce. Je me marie dans un mois ! n’essayez pas de venir, on vous chasserait. Mon futur est un homme très sérieux, il a vingt-huit ans. Je n’oserai jamais lutter contre sa volonté.

» Adieu, Monsieur Bruno, pardonnez-moi la peine