Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/142

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ne tiennent jamais devant les grands ouragans : la guerre ou la peste, la famine ou l’inondation. La puissance éternelle c’est l’amour. Si l’homme avait compris quelque chose à la vie qu’on lui donnait pour en jouir et non pas pour la diminuer au nom de je ne sais quel respect dit humain, il aurait, depuis beau jour, construit et le temple de l’esprit et le palais des grâces, nous serions plus heureux, nous vivrions plus longtemps, au moins plus fort. Le train de notre existence a déraillé, il déraillera jusqu’au précipice… puis, s’il reste un couple, des êtres jeunes, sains et qui auront tout oublié de l’enseignement trop professionnel des parents, alors pourra-t-on recommencer en beauté. Pour le moment ça me paraît devoir finir en laideur… Voulez-vous que nous prenions le café dans la serre, mon cher ami ?

Dans la serre, Boreuil contemple silencieusement la femme nue, boit son café par petits coups de gorge voluptueux et méditatifs.

— Finir en beauté ? Hum ! Si vous rencontriez, un soir de dépression physique, le modèle de cette étude-là, une fantaisie de votre trop riche imagination, votre chef-d’œuvre, certainement, pourriez-vous le reconnaître ? Tout est hasard dans la vie des amoureux ou des monstres de votre espèce.