Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/162

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

m’imaginais un de ces horribles petits champignons vénéneux, fruit de la malsaine humidité des printemps parisiens, un revenez-y du poison mystérieux qui a tué ce grand corps mis en cage, et c’est bien sa propre race qui lui offre ce gage de verdeur. Avec qui fait-il l’amour, celui-là ? Ou est-ce une galanterie posthume en l’honneur du portrait de la femme nue ?

Nous sommes en Mai. Le temps est, ce soir, tiède comme un bain délassant. J’ai dit à mon chauffeur de garer la voiture derrière un pavillon du Bois et de m’attendre. Ils seront nombreux, les chauffeurs qui attendent leur patron ou leur patronne en bonne fortune sous les halliers aux verdures nouvelles ! On prétend que les allées un peu écartées des grandes voies ne sont pas très sûres, vers une heure du matin. Allons donc ! Les malfaiteurs eux-mêmes pensent-ils à d’autres exploits, par ce temps-ci, qu’aux exploits amoureux ? J’ai un revolver dans ma poche pour le… surplus et, si je vaux un homme, Sirloup vaut deux chiens.

La nuit est délicieuse. Elle est une de ces surprises que notre climat, toujours si pluvieux, nous réserve quand tout nous semble perdu, gâché, hors de saison.

C’est un des souvenirs d’une autre existence que les vieillards regrettent en nous