Page:Rachilde - Refaire l’amour, 1928.djvu/241

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

un damné, je sais que mon orgueil, celui qu’elle vient de froisser sous son talon, n’abdiquera pas. Cette femme, j’ignore pourquoi, m’a donné deux moments de son existence qu’elle efface implacablement. Elle se venge… ou venge les autres ?

Refaire l’amour ? Qui me refait !… Je repasse devant la petite table, d’un geste involontaire (je ne suis plus que le volant d’une machine emballée) je me saisis de ce presse-papier. de cet objet en acier, mon revolver. Je vise la femme à la tête, cette jolie tête brune se penchant sur Sirloup. Non, il ne faut pas la défigurer. J’abaisse l’arme, vise à la poitrine. Mon chien perçoit le déclic du cran d’arrêt, il se redresse, brusquement, les oreilles pointées. Le coup part…

…Et c’est lui qui tombe, le crâne fracassé, la gueule horriblement ouverte pour un hurlement que le sang étouffe.

La femme est debout, terrifiée, devant le cadavre du chien, raidi dans sa dernière convulsion.

— C’est abominable, Alain ! Pourquoi avez-vous tué ce pauvre animal ?

— Je ne l’ai pas tué. Il est mort à votre place, voilà tout.

Je crois que je lui ai répondu. Je n’en suis pas sûr.

Elle s’enfuit, glisse éperdument sous les