Page:Racine - Œuvres, Didot, 1854.djvu/555

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en état de prendre des quartiers en Italie, comme la victoire de Flandre est suivie de la prise de Char- leroi , qui ferme et assure entièrement nos frontiè- res de ce côte-là. L'impuissance où s'est trouvé M. le prince d'Orange de secourir une place si importante marque bien la grandeur de sa défaite et de la perte qu'y tirent les alliés. Le roi reçut hier la nouvelle que les assiégés avaient battu la chamade dimanche dernier, à sept heures du matin. Us auraient pu se défendre encore huit ou dix jours , à cause de la dif- ûculté quon trouvait à faire des mines sous les bas- tions et sous la courtine ; mais ils étaient réduits à dix-huit cents hommes , de près de quatre mille qu'ils étaient. ^I. de Castille même , qu'on avait mis au- dessus du gouverneur pour commander dans la place, était blessé. Ainsi ils se sont rendus, et ont fait grand plaisir à notre cavalerie, qui conmiençait à pâtir beaucoup. Vous pourrez lire ces nouvelles à M. Des- préaux, au cas que vous l'alliez voir; car je ne sais si je pourrai lui écrire aujourd'hui , à cause de la quan- tité de lettres que j'ai à écrire. J'ai vn les drapeaux et les étendards qu'a envoyés M. de Catinat , et je vous conseille de les aller voir avec votre mère quand on les portera à >'otre-Damc. Il y a cent deux drapeaux et quatre étendards seule- ment ; ce qui marque que la cavalerie ennemie n'a pas fait beaucoup de résistance , et a de bonne heure abandonné l'infanterie , laquelle a presque été toute taillée en pièces. Il y avait des bataillons entiers d'Es- pagnols qui se jetaient à genoux pour demander quar- tier, et on l'accordait à quelques-uns d'eux ; au lieu qu'on n'en faisait point du tout aux Allemands, parce qu'ils avaient menacé de n'en point faire. Il me semble que , dans une de vos lettres , vous me demandiez la permission de faire présent d'une Athalie à un chartreux. Tous le pouvez faire sans difficulté. Je suis seulement fâché de ne m'être pas souvenu plus tôt de vous en parler. Le roi partira de demain en huit jours pour aller à Choisy, oià il doit coucher deux nuits. Pour moi, j'irai ce jour-là tout droit à Paris ; et j'espère que ce sera avec M. de Cavoie , qui commence à se mieux porter, et à qui M. Félix promet une prochaine gué- rison. Madame sa femme» dit que c'est votre mère qui l'a guéri avec le remède de tête de mouton qu'elle lui a enseigné , et dont madame de Cavoie , qui avait aussi un commencement de dyssenterie , s'est fort bien trouvée. Je viens d'apprendre que M. du Tartre avait une grosse CèvTe. Il a eu en tête de demander la chambre où M. Moreau est mort d'une fièvre ma- ligne. Je fis ce que je pus pour l'empêcher d'y mettre ' Loaise-Phillppe de Coétlogon. Elle avait été fille d'honneur de la reine , et mourut à Paris en 1729. à l'âge de quatre-vingt- huit ans. A SON FILS. i4a son lit, mais je ne le persuadai point. Je craindrais qu'il n'eilt gagné la même fièvre. Faites bien des amitiés pour moi à votre mère, et dites-lui que cette lettre est pour elle aussi bien que pour vous. Faites aussi mes baisemains à vos sœurs. M. l'archevêque de Sens a perdu monsieur son frère à la bataille , et je crois que M. Chapelier vous l'aura dit. LETTRE X. A Fontainebleau , le 24 septembre lOM. Je vous suis obligé du soin que vous avez pris de faire toutes les choses que je vous avais recomman- dées. Je suis en peine de la santé de M. IN'icole , et vous me ferez plaisir d'y envoyer de ma part , et de me mander de ses nouvelles. J'espère retourner à .^felun lundi ou mardi avec M. l'archevêque de Sens, en attendant que j'y aille avec M. F'élix. Je croyais avoir fait mettre dans mon coffre un livre que j'ai été fort fâché de n'y avoir point trouvé. Ce sont les Psaumes latins de Valable , à deux colonnes et avec des notes , in-S» , qui sont à la tablette où je mets d'ordinaire mon diurnal. Je vous prie de les cher- cher et de les empaqueter bien proprement dans du papier, et d'envoyer savoir par le cocher si M. l'abbé de Saillans vient à Fontainebleau bientôt. Au cas qu'il y vienne , il faudrait l'envoyer prier de vouloir mettre ce livre dans son paquet; sinon il faudra prier M. Sconin de le donner au valet de chambre de M. le duc de ChevTeuse, qui viendra peut-être ici dans peu de jours. On a eu aujourd'hui nouvelle que les Anglais avaient voulu faire jouer quelques machines contre le port de Dunkerque ' , mais qu'on avait fait sauter en l'air ces machines, avec une perte des hommes qui étaient dessus. Les Allemands ont passé le Rhin , et font quelques ravages en Alsace; mais il y a appa- rence qu'on les fera bientôt repasser. J'écrirai demain à votre mère. Faites-lui mes compliments et à vos sœurs. Adieu, mon cher fils. Je vous donne le bon- soir, et suis entièrement à vous. Faites aussi mes bai- semains à M. deGrimarest». Je n'ai pas encore pu parler de son affaire , mais je ne l'oublie point. Suscription : A M. Racine le jeune, rue du Ma- rais , faubourg Saint-Germain, à Paris. LETTRE XL A Fontainebleau , le 3 octobre n»l. Je vous adresse ime lettre pour M. Despréaux, que je prie votre mère de lui envoyer le plus tôt » Cette tentative eut lieu le 21 septembre. ^ Léonard le Gallois , sieur de Grimarest , connu par une fie de Molière, Il mourut en 1720. Son nom figure dans c#«  I fameux couplets attribués à Jean-Bapliste Rousseau. i^Jnon.)