Page:Racine - Œuvres, tome 1, 1679.djvu/302

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Je vous fis ſur mes pas entrer dans ſa Famille.
Je vous nomay ſon Gendre, & vous donnay ſa Fille.
Silanus qui l’aimoit, s’en vit abandonné,
Et marqua de ſon ſang ce jour infortuné.
Ce n’étoit rien encore. Euſſiez-vous pû pretendre
Qu’un jour Claude à ſon Fils dût preferer ſon Gendre ?
De ce meſme Pallas j’imploray le ſecours,
Claude vous adopta, vaincu par ſes diſcours,
Vous appella Neron, & du pouvoir ſuprême
Voulut avant le temps vous faire part luy-meſme.
C’eſt alors que chacun rappellant le paſſé
Découvrit mon deſſein, déja trop avancé,
Que de Britannicus la diſgrace future
Des amis de ſon Pere excita le murmure.
Mes promeſſes aux uns ébloüirent les yeux,
L’exil me délivra des plus ſeditieux.
Claude même laſſé de ma plainte éternelle
Eſloigna de ſon Fils tous ceux, de qui le zele
Engagé dés long-temps à ſuivre ſon deſtin,
Pouvoit du Trône encor luy rouvrir le chemin.
Je fis plus : Je choiſis moy-même dans ma ſuite
Ceux à qui je voulois qu’on livraſt ſa conduite.
J’eus ſoin de vous nommer, par un contraire choix,
Des Gouverneurs que Rome honoroit de ſa voix.

Je fus ſourde à la brigue, & crus la Renommée.
J’appellay de l’exil, je tiray de l’Armée,
Et ce même Seneque, & ce même Burrhus,
Qui depuis… Rome alors eſtimoit leurs vertus.
De Claude en même temps épuiſant les richeſſes
Ma main, ſous vôtre nom, répandoit ſes largeſſes.
Les Spectacles, les dons, invincibles appas
Vous attiroient les cœurs du Peuple, & des Soldats,