Page:Racine - Œuvres, tome 1, 1679.djvu/98

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Pour cette liberté que détruisent ses charmes,
Elle rougit des fers qu’on apporte en ces lieux,
Et n’y saurait souffrir de tyrans que ses yeux.
Il faut servir, ma sœur, son illustre colère ;
Il faut aller…

Cléophile
Eh bien ! perdez-vous pour lui plaire :
De ces tyrans si chers suivez l’arrêt fatal,
Servez-les, ou plutôt servez votre rival.
De vos propres lauriers souffrez qu’on le couronne.
Combattez pour Porus, Axiane l’ordonne,
Et par de beaux exploits appuyant sa rigueur,
Assurez à Porus l’empire de son cœur.

Taxile
Ah ! ma sœur, croyez-vous que Porus…

Cléophile
Mais vous-même
Doutez-vous en effet qu’Axiane ne l’aime ?
Quoi ? ne voyez-vous pas avec quelle chaleur
L’ingrate à vos yeux même étale sa valeur ?
Quelque brave qu’on soit, si nous la voulons croire,
Ce n’est qu’autour de lui que vole la Victoire ;
Vous formeriez sans lui d’inutiles desseins,
La liberté de l’Inde est toute entre ses mains ;
Sans lui déjà nos murs seraient réduits en cendre ;
Lui seul peut arrêter les progrès d’Alexandre.
Elle se fait un dieu de ce prince charmant,
Et vous doutez encor qu’elle en fasse un amant ?

Taxile
Je tâchais d’en douter, cruelle Cléofile.
Hélas ! dans son erreur affermissez Taxile.
Pourquoi lui peignez-vous cet objet odieux ?
Aidez-le bien plutôt à démentir ses yeux :
Dites-lui qu’Axiane est une beauté fière,
Telle à tous les mortels qu’elle est à votre frère ;