Ce Fils meſme, ce Fils, l’objet de tant de ſoins,
Si je l’auois ſauué, vous l’en aimeriez moins.
La haine, le mépris, contre moy tout s’aſſemble.
Vous me haïſſez plus que tous les Grecs enſemble.
Ioüissez à loiſir d’vn ſi noble courroux.
Allons, Phœnix.
Allons rejoindre mon Eſpoux.
Madame…
Auteur de tous mes maux, crois-tu qu’il les ignore ?
Seigneur, voyez l’eſtat où vous me réduiſez ?
I’ay veu mon Pere mort, & nos Murs embraſez,
I’ay veû trancher les iours de ma Famille entiere,
Et mon Eſpoux ſanglant traiſné ſur la pouſſiere,
Son Fils ſeul avec moy reſerué pour les fers.
Mais que ne peut vn Fils, je reſpire, je ſers.
I’ay fait plus. Ie me suis quelquefois conſolée
Qu’icy, plûtoſt qu’ailleurs le ſort m’euſt exhilée ;
Qu’heureux dãs ſon malheur, le Fils de tant de Rois,
Puis qu’il deuoit ſeruir, fuſt tombé ſous vos lois.
I’ay crû que ſa priſon deuiendroit ſon Azile.
Iadis Priam ſoûmis fut reſpecté d’Achille,
I’attendois de ſon Fils encor plus de bonté.
Pardonne, cher Hector, à ma crédulité.
Ie n’yi pû ſoupçonner ton Ennemy d’vn crime,
Malgré luy-meſme enfin je l’ay crû magnanime.