Aller au contenu

Page:Racine - Andromaque, Girard, 1668.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
66
ANDROMAQVE

Scène V.

PYRRHVS, HERMIONNE, PHOENIX.
PYRRHVS.


Vous ne m’attendiez pas, Madame, & ie voy bien
Que mon abord icy trouble voſtre entretien.
Ie ne viens point armé d’vn indigne artifice
D’vn voile d’équité couurir mon injuſtice.
Il ſuffit, que mon cœur me condamne tout bas,
Et ie ſoûtiendrois mal ce que ie ne croy pas.
I’épouſe vne Troyenne. Oüy, Madame, & j’auouë
Que ie vous ay promis la foy, que ie luy vouë.
Vn autre vous diroit, que dans les champs Troyens
Nos deux Peres ſans nous formerent ces liens,
Et que ſans conſulter ny mon cœur ny le voſtre.
Nous fuſmes ſans amour engagez l’v à l’autre.
Mais c’eſt aſſez pour moy que ie me ſois ſoûmis.
Par mes Ambaſſadeurs mon cœur vous fut promis.
Loin de les reuoquer, ie voulus y ſouſcrire.
Ie vous vis auec eux arriuer en Epire.
Et quoy que d’vn autre œil l’éclat victorieux
Euſt déja préuenu le pouuoir de vos yeux ;
Ie ne m’arreſtay point à cette ardeur nouuelle.
Ie voulus m’obſtiner à vous eſtre fidelle.
Ie vous receûs en Reine, & iuſques à ce jour,
I’ay cru que mes ſermens me tiendroient lieu d’amour.