Page:Racine - Britannicus 1670.djvu/63

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NERON.
Ainſi par le deſtin nos vœux ſont traverſez,

J’obeïſſois alors, & vous obeïſſez.
Si vous n’avez appris à vous laiſſer conduire,
Vous eſtes jeune encore, & l’on peut vous inſtruire.

BRITANNICUS.
Et qui m’en inſtruira ?
NERON.
Et qui m’en inſtruira ? Tout l’Empire à la fois,

Rome.

BRITANNICUS.
Rome. Rome met elle au nombre de vos droits

Tout ce qu’a de cruel l’injuſtice & la force,
Les empriſonnemens, le rapt, & le divorce ?

NERON.
Rome ne porte point ſes regards curieux

Juſques dans des ſecrets que je cache à ſes yeux.
Imitez ſon reſpect.

BRITANNICUS.
Imitez ſon reſpect. On ſçait ce qu’elle en penſe.
NERON.
Elle ſe taiſt du moins, imitez ſon ſilence.
BRITANNICUS.
Ainſi Neron commence à ne ſe plus forcer.
NERON.
Neron de vos diſcours commence à ſe laſſer.
BRITANNICUS.
Chacun devoit benir le bon-heur de ſon regne.
NERON.
Heureux ou mal-heureux, il ſuffit qu’on me craigne.
BRITANNICUS.
Je connoy mal Junie, ou de tels ſentimens

Ne meriteront pas ſes applaudiſſemens.