Et devez vous haïr les innocens appas ?
Si je la haïſſois, je ne la fuirois pas.
Seigneur, m’eſt il permis d’expliquer voſtre fuite ?
Pourriez-vous n’eſtre plus ce ſuperbe Hippolyte,
Implacable ennemy des amoureuſes lois,
Et d’un joug que Theſée a ſuby tant de fois ?
Venus par voſtre orgueil ſi long-temps mépriſée,
Voudroit-elle à la fin juſtifier Théſée ?
Et vous mettant au rang du reſte des mortels
Vous a t elle forcé d’encenſer ſes autels ?
Aimeriez-vous, Seigneur ?
Amy, qu’oſes-tu dire ?
Toy, qui connois mon cœur depuis que je reſpire,
Des ſentimens d’un cœur ſi fier, ſi dédaigneux,
Peus-tu me demander le deſaveu honteux ?
C’eſt peu qu’avec ſon lait une Mere Amazone
M’ait fait ſuçer encor cet orgueil qui t’étonne.
Dans un âge plus meur moy-meſme parvenu
Je me ſuis applaudy, quand je me ſuis connu.
Attaché prés de moy par un zele ſincere
Tu me contois alors l’hiſtoire de mon Pere.
Tu ſçais combien mon ame attentive à ta voix
S’échauffoit au récit de ſes nobles exploits ;
Quand tu me dépeignois ce Heros intrepide
Conſolant les Mortels de l’abſence d’Alcide ;
Les Monſtres étouffez, & les Brigans punis,
Procruſte, Cercyon, & Scirron, & Sinnis,