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Page:Racine - Théâtre choisi, 1904, éd. Lanson.djvu/143

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LES PLAIDEURS

COMÉDIE




ACTE I




Scène PREMIÈRE

PETIT JEAN, traînant un gros sac de procès.

Ma foi, sur l’avenir bien fou qui se fîra ;
Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.
Un juge, l’an passé, me prit à son service ;
Il m’avoit fait venir d’Amiens pour être Suisse.
Tous ces Normands vouloient se divertir de nous :
On apprend à hurler, dit l’autre[1], avec les loups.
Tout Picard que j’étois, j’étois un bon apôtre,
Et je faisois claquer mon fouet tout comme un autre.
Tous les plus gros monsieurs me parloient chapeau bas :
« Monsieur de Petit Jean, » ah ! gros comme le bras !
Mais sans argent l’honneur n’est qu’une maladie.
Ma foi, j’étois un franc portier de comédie[2] :

  1. Dit l’autre : façon populaire de fonder les proverbes sur une autorité
    traditionnelle et très vague.
  2. Le portier de la comédie percevait l’argent des places. Nombre de