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Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/119

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Quel est ce sombre accueil, et ce discours glacé

Qui semble révoquer tout ce qui s'est passé?

Sur quel espoir croit-il que je me sois rendue

Et qu'il ait regagné mon amitié perdue?

J'ai cru qu'il me jurait que jusques à la mort

Son amour me laissait maîtresse de son sort.

Se repent-il déjà de m'avoir apaisée?

Mais moi-même tantôt me serais-je abusée?

Ah!... Mais il vous parlait: quels étaient ses discours, Madame?

Atalide

Moi, Madame? Il vous aime toujours.

Roxane

Il y va de sa vie au moins que je le croie.

Mais, de grâce, parmi tant de sujets de joie,

Répondez-moi, comment pouvez-vous expliquer

Ce chagrin qu'en sortant il m'a fait remarquer?

Atalide

Madame, ce chagrin n'a point frappé ma vue.

Il m'a de vos bontés longtemps entretenue;

Il en était tout plein quand je l'ai rencontré,

J'ai cru le voir sortir tel qu'il était entré

Mais, Madame, après tout, faut-il être surprise

Que, tout prêt d'achever cette grande entreprise,

Bajazet s'inquiète, et qu'il laisse échapper

Quelque marque des soins qui doivent l'occuper?

Roxane

Je vois qu'à l'excuser votre adresse est extrême:

Vous parlez mieux pour lui qu'il ne parle lui-même.

Atalide

Et quel autre intérêt...

Roxane

Madame, c'est assez.

Je conçois vos raisons mieux que vous ne pensez.

Laissez-moi: j'ai besoin d'un peu de solitude.

Ce jour me jette aussi dans quelque inquiétude.

J'ai, comme Bajazet, mon chagrin et mes soins,

Et je veux un moment y penser sans témoins.

Scène VII.

Roxane, seule.

De tout