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TRAGÉDIE. 507

Quel crime a pu produire un trouble fi prefTant î Vos mains n'onc point trempé dans le fang innocent.

Phèdre. Grâces au ciel mes mains ne font point criminelles. Plut aux dieux que mon cœur fut innocent comme elles !

(ff. N O N E.

Et quel affreux projet avez-vous enfanté , Dont votre cœur encor doive être épouvanté ?

Phèdre. Je t'en ai dit affez. Epargne-moi le refte. Je meurs pour ne point faire u* aveu fi funefte.

(E N o N E.

Mourez donc , & gardez un filence inhumain. Mais, pour fermer vos yeux, cherchez une autre main. Quoiqu'il vous relte à peine une foible lumière , Mon ame chez les morts defcendra la première , Mille chemins ouverts y conduifent toujours , Et ma jufte douleur choifira les plus courts. Cruelle , quand ma foi vous a-t-elle déçue .' Songez-vous qu'en naiilant mes bras vous ont reçue ? Mon pays , mes enfans , pour vous j'ai tout quitté. Réfcrviez-vous ce prix à ma fidélité ?

Phèdre. Quel fruit efpères-tu de tant de violence ? Tu frémiras d'horreur fi je romps le filence.

(K N o N E.

Et que me direz-vous, qui ne cède , grands dieux , A l'horreur de vous voir expirer à mes yeux ?

Phèdre. Quand tu fauras mon crime , & le fort qui m'accable , Je n'en mourrai pas moins, j'en mourrai plus coupable.

(E N o N e.

Madame , au nom des pleurs que pour vous j'ai verf^a, Par vos foiblcs genoux que je tienj embraflés, Délivrez mon efprit de ce funefte doute.

Phèdre, Tq le veux. Lève-toi.

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