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Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/53

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Arsace.

Moins que jamais, Seigneur, il faut vous éloigner.

Antiochus

Moi, je demeurerai pour me voir dédaigner !
Des froideurs de Titus je ſerai reſponſable !
Je me verrai puni parce qu’il eſt coupable !
Avec quelle injuſtice & quelle indignité,
Elle doute, à mes yeux, de ma ſincérité !
Titus l’aime, dit-elle, & moi je l’ai trahie.
L’ingrate, m’accuſer de cette perfidie !
Et dans quel temps encor ? Dans le moment fatal
Que j’étale à ſes yeux les pleurs de mon rival ;
Que, pour la conſoler, je le faiſois paroître
Amoureux & constant, plus qu’il ne l’eſt peut-être.

Arsace.

Et de quel ſoin, Seigneur, vous allez-vous troubler ?
Laiſſez à ce torrent le temps de s’écouler.
Dans huit jours, dans un mois, n’importe, il faut qu’il paſſe.
Demeurez ſeulement.

Antiochus

Demeurez ſeulement. Non, je la quitte, Arſace.
Je sens qu’à ſa douleur je pourrois compatir :
Ma gloire, mon repos, tout m’excite à partir.
Allons ; & de ſi loin évitons la cruelle,
Que de long-temps, Arſace, on ne nous parle d’elle.
Toutefois il nous reſte encore aſſez de jour.
Je vais dans mon palais attendre ton retour.
Va voir ſi ſa douleur ne l’a point trop ſaiſie.
Cours ; & partons du moins aſſurés de ſa vie.

Fin du troiſième Acte.