Page:Racine Théâtre Barbou 1760 tome2.djvu/75

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J’ai cru que votre amour allait finir ſon cours.
Je connois mon erreur, & vous m’aimez toujours.
Votre cœur s’eſt troublé, j’ai vu couler vos larmes.
Bérénice, Seigneur, ne vaut point tant d’allarmes ;
Ni que par votre amour l’univers malheureux,
Dans le temps que Titus attire tous ſes vœux,
Et que de vos vertus il goûte les prémices,
Se voie en un moment enlever ſes délices.
Je crois, depuis cinq ans, juſqu’à ce dernier jour,
Vous avoir aſſuré d’un véritable amour.
Ce n’eſt pas tout, je veux, en ce moment funeſte,
Par un dernier effort couronner tout le reſte.
Je vivrai, je ſuivrai vos ordres abſolus.
Adieu, Seigneur, régnez, je ne vous verrai plus.

(à Antiochus.)

Prince, après cet adieu, vous jugez bien vous-même,
Que je ne conſens pas de quitter ce que j’aime,
Pour aller, loin de Rome, écouter d’autres vœux.
Vivez, & faites-vous un effort généreux.
Sur Titus & ſur moi réglez votre conduite.
Je l’aime, je le fuis. Titus m’aime, il me quitte.
Portez loin de mes yeux vos ſoupirs & vos fers.
Adieu. Servons tous trois d’exemple à l’univers
De l’amour la plus tendre & la plus malheureuse
Dont il puiſſe garder l’hiſtoire douloureuſe.
Tout eſt prêt. On m’attend. Ne ſuivez point mes pas.

(à Titus.)

Pour la dernière fois, adieu, Seigneur.

Antiochus

Pour la dernière fois, adieu, Seigneur. Hélas !


FIN.