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a58 ŒUVRES

l'hiftorién ne doit avoir dans l'efpnt que la liberté & la vérité , il faut aufii qu'il n'ait pour but dans fon ftyle que la netteté. Se de repréfenter les chofes telles qu'elles font. En un mot, que tout le monde l'en- tende , & que les favans le louent : ce qui arrivera , s'il fc fert d'expreffions qui ne foient point trop re- cherchées, ni auflî trop communes.

Il faut pourtant que l'hiftoiien ait quelque chofe du poète dans hs penfées , fur-tout lorfqu'il viendra à décrire une bataille, des armées qui fe vont choquer, des vaifleaux prêts à combattre : c'efl: alors qu'il a bc- foin, pour ainfî dire, d'un vent poétique qui enfle les voiles , & qui fafle groflir la mer. Il faut pourtant que, l'cxpreflion ne s'élève guère de terre.

N'avoir point trop foin de l'harmonie & du fon , mais auflî ne pas écorcher les oreilles.

Il faut bien prendre garde de qui on prend desi Mémoires , & ne confulter que des gens non fufpe^ts- ou de haine ou de complaifance , foit pour eux-mêmes , foit pour les autres.

Quand on a fait proviflon de bons mémoires, alors il faut les coudre, & faire comme un corps d'hilloire , fec & décharné d'abord, pour y mettre enluite la chair & les couleurs.

II faut , comme le Jupiter d'Homère , que l'hifto- iien porte les yeux de tous côtés, & qu'il voye auliî- bien ce qui fe palTe dans le parti ennemi , que dan* l'autre parti.

Il doit être comme un miroir pur &: fans :âche , qui reçoit les objets tels qu'ils font , ne mettant rien du, fien qu'une expreflion naïve , fans fe mettre en peine de quelle nature eft ce qu'il dit , mais de quelle ma- n'ere il le doit dire.

Sa narration ne doit pas être découfuc : non-feule- ment les chofes doivent fe fuivre , mais fe tenir les unes aux autres.

Il faut fivoir ne point s'étendre dans les defcrip- tion$ : témoin Homère , qui en a pu faire de Ci belles

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