Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T1.djvu/13

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pâturages et des bois qui les avoisinoient ; des troupeaux, de simples chaumières reposoient les regards fatigués de l’aspect des abîmes. Au nord et à l’orient s’étendoient à perte de vue les plaines du Languedoc, et l’horizon se confondoit au couchant avec les eaux du golfe de Gascogne.

M. Saint-Aubert aimoit à errer, accompagné de sa femme et de sa fille, sur les bords de la Garonne ; il se plaisoit à écouter le murmure harmonieux de ses eaux. Il avoit connu une autre vie que cette vie simple et champêtre ; il avoit long-temps vécu dans le tourbillon du grand monde, et le tableau flatteur de l’espèce humaine, que son jeune cœur s’étoit tracé, avoit subi les tristes altérations de l’expérience. Néanmoins la perte de ses illusions n’avoit ni ébranlé ses principes ni refroidi sa bienveillance : il avoit quitté la multitude avec plus de pitié que de colère, et s’était borné pour toujours aux douces jouissances de la nature, aux plaisirs innocens de l’étude, à l’exercice enfin des vertus domestiques.

Il étoit d’une branche cadette, mais il descendoit d’une illustre famille ; et ses parens auroient souhaité que, pour réparer les injures de la fortune, il eût eu recours à