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CHAPITRE III.

Les voitures furent de bonne heure à la porte. Le fracas des domestiques qui alloient, venoient et se heurtoient dans les galeries, tirèrent Emilie d’un sommeil fatigant. Son esprit agité lui avoit présenté toute la nuit les plus effrayantes images et l’avenir le plus, sombre. Elle s’efforça de bannir ces sinistres impressions ; mais elle passoit d’un mal imaginaire à la certitude d’un mal réel. Se rappelant qu’elle avoit quitté Valancourt, et peut-être pour toujours, son cœur s’affoiblissoit à mesure que la mémoire se ranimoit en elle. Elle essaya d’écarter les tristes présages de son imagination, et de concentrer sa douleur, qu’elle ne pouvoit vaincre ; ces efforts répandoient sur son maintien une expression de résignation douce, comme un voile léger rend une beauté plus touchante tout en lui dérobant quelques traits. Mais madame Montoni ne remarqua que son extraordinaire pâleur, et lui en fit de vifs reproches ; elle dit à sa nièce qu’elle s’étoit livrée à des regrets d’enfant, qu’elle la prioit de garder un peu mieux le décorum, et de ne pas laisser voir qu’elle ne pouvoit renoncer à un at-