Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T3.djvu/214

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ses forces. L’horloge sonna une heure : c’étoit vers ce moment que les sons avoient commencé ; elle s’assit près de la fenêtre, et tâcha de calmer ses esprits ; mais le doute et l’attente les tenoient dans l’agitation. Tout néanmoins resta dans le silence ; elle entendoit seulement les pas de la sentinelle et le murmure sourd de la forêt. Elle se remit à la fenêtre, et regarda la planète comme pour l’interroger.

Emilie écouta ; mais aucune musique ne se fit entendre. Ce n’étoit pas sûrement, se disoit-elle, ce n’étoit pas une mélodie mortelle : aucun habitant de ce château ne pouvoit la produire. Et où est le sentiment qui s’exprimeroit avec cette perfection ? Il est reconnu que des accords célestes ont été quelquefois entendus sur la terre. Quelques saints personnages ont déclaré les avoir entendus lorsque, dans le silence des nuits, ils adressoient leurs vœux à l’Éternel. Mon père lui-même, mon respectable père, m’a dit une fois que, peu de temps après la mort de ma mère, et dans une de ses insomnies, des sons d’une singulière douceur l’avoient fait sortir de son lit. Il ouvrit la fenêtre, et une musique céleste traversa les airs : ce fut pour lui une consolation, il me l’a dit ; et regardant le ciel avec confiance, il se