Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T4.djvu/131

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Emilie ne pouvoit approcher de ces bois sans éprouver de plus en plus le sentiment de son danger. Le profond silence qui y régnoit, leur épais feuillage que n’agitoit pas le moindre souffle, leur ombre noire que rembrunissoient encore la vive clarté des éclairs, la flamme rougeâtre de la torche, tout contribuoit à renouveler ses plus terribles appréhensions. Elle crut qu’à ce moment la figure de ses conducteurs déployoit une fierté plus farouche, et la joie d’un triomphe qu’ils cherchoient à dissimuler. Son imagination troublée lui suggéra qu’on la menoit dans un bois pour y compléter, par un meurtre, la vengeance de Montoni. Cette horrible pensée arracha un soupir de son cœur. Ses compagnons, surpris, revinrent promptement à elle. Elle leur demanda pourquoi ils la menoient à ces bois, les engagea à continuer le chemin sur la route, et leur représenta que, pendant un orage, elle seroit moins dangereuse que les bois.

— Non, non, lui dit Bertrand : nous savons bien où est le danger. Voyez les nuages qui s’ouvrent sur nos têtes ; en outre, sous les bois, nous risquons moins d’être vus par l’ennemi, si par hasard il passoit dans le chemin. Par Saint Pierre et sa com-