Page:Radcliffe Chastenay - Les Mysteres d Udolphe T6.djvu/164

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du silence qui y régnoit, elle supposa que toutes les religieuses étoient à l’église. Enfin une religieuse entra avec un air empressé, cherchant l’abbesse, et ne remarquant point Emilie. Celle-ci se fit connoître, et apprit qu’on alloit faire une prière pour l’âme de sœur Agnès. Elle avoit langui fort long-temps, et dans ce moment on la croyoit mourante.

La sœur lui détailla les souffrances de sœur Agnès et les horribles convulsions qu’elle avoit eues. Elle étoit retombée dans un état de désespoir si profond, que ni ses propres prières, auxquelles la communauté se joignoit, ni l’assurance que lui donnoit son confesseur, ne pouvoient la calmer ni lui donner un seul instant de consolation.

Emilie écoutoit ce récit avec un extrême intérêt ; elle se rappeloit l’espèce d’égarement et l’expression sinistre qu’elle avoit souvent remarqués sur la figure d’Agnès : elle se rappeloit aussi l’histoire que sœur Françoise lui avoit racontée, et sa pitié en devenoit plus vive. Il étoit tard, Emilie ne put ni la voir ni se joindre aux prières des religieuses ; elle chargea la sœur de complimens pour ses amies, et retourna au château en suivant les rochers, et en rêvant tristement à ce qu’elle venoit d’apprendre.