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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

voir aucun encouragement. Ils restèrent immobiles, dans un malaise affreux.


François, pensant un jour à cette scène, fit un calcul indigne de son amour. Bien qu’il n’eût pas mal entendu le silence de Mahaut, il pensa en profiter, et à tirer bénéfice d’une situation qui leur avait été si pénible. Le souvenir du baiser le poussait à prendre une revanche. Mais le soir où son bras se glissa de nouveau, Mme d’Orgel sentit bien qu’il se glissait exprès. Elle ne pensa pas une seconde se trouver en face de l’amour, ou simplement du désir. Ce geste lui apparut comme une insulte à l’amitié. « Je me suis méprise. Il ne mérite pas notre confiance. » Toutefois elle n’osa retirer son bras, de peur d’attirer le regard d’Anne. Pour une faute de goût de François, devait-elle risquer une brouille ? Elle espérait encore qu’il remuerait ; au contraire, il insistait, enhardi par ce silence.

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