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LE BAL DU COMTE D’ORGEL

En proie à une véritable surprise, le comte d’Orgel se taisait. Car il n’était habile à exprimer que ce qu’il n’éprouvait pas. Cette surprise passée, il sut la feindre. Au récit des malheurs de Naroumof, il lui proposa spontanément de le loger chez eux. Mais la bonté et la légèreté du comte d’Orgel se combinaient si bien qu’on ne pouvait les désunir ; une chose le tracassait : le prince n’allait-il pas déranger l’ordonnance d’une soirée consacrée à la mise au point du bal ? Certes on ne pouvait rêver de plus grande « attraction », que ce prince arrivant en droite ligne d’un pays de mystère. Mais c’était son économie de maître de maison qui poussait Anne d’Orgel à déplorer que Naroumof débarquât sans crier gare. Dès ce moment, il décida de ne pas trop le mettre en vedette et de le réserver pour un dîner politique. Pour un peu il l’eût fait attendre dans les coulisses et tenir compagnie à sa sœur, qui devait dîner seule.

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